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CHRONIQUES DE LAURENCE JAMOTTE
27 Février 2000-Peine de mort: une nécessaire réflexion
Betty Lou Beets, une américaine de 62 ans, a été exécutée par injection
létale dans la prison de Huntsville au Texas, la semaine dernière. Georges
Bush Jr n’a pas cédé. Le gouverneur de la province, en campagne pour obtenir
l’investiture républicaine dans la course à la présidence, a refusé
d’accorder un sursis de trente jours, puis a rejeté la grâce demandée par
Betty Lou Beets.
Condamnée pour le meurtre de son cinquième mari en 1983, Betty Lou Beets
avait également été inculpée, sans jamais être jugée, pour l’assassinat de
son quatrième époux. Bien que ses enfants aient témoigné contre elle, la
condamnée avait toujours nié les faits.
Betty Lou Beets est la 121ème personne exécutée au Texas depuis que Georges
Bush est au poste de gouverneur en 1995 et la quatrième femme aux Etats-Unis
depuis le rétablissement de la peine de mort en 1976. Aux Etats-Unis, son
cas a suscité une vive polémique. Les adversaires de la peine de mort ont
fait valoir que son père avait abusé d’elle, qu’elle avait subi les actes
violents de ces cinq maris et qu’elle n’avait pas bénéficié d’une défense
adéquate lors de son procès.
En Europe, son exécution a entraîné une forte réprobation. La présidente du
Parlement européen, Nicole Fontaine, qui avait lancé un ultime appel pour
sauver la condamnée, a estimé qu’une telle exécution est "d’autant plus
révoltante et indigne d’une démocratie" qu’elle a lieu en période
électorale.
Cette semaine, un autre cas risque d’alimenter la polémique. Depuis 9 ans,
Odell Barnes patiente dans le "couloir de la mort", dans la même prison
d’Huntsville. Condamné à mort en 1991 pour le meurtre d’une femme, l’homme,
de couleur noire, âgé de 31 ans aujourd’hui, ne cesse de clamer son
innocence mais il a épuisé tous les recours juridiques. Il doit être exécuté
le 1er mars, alors qu’il semble avoir été victime d’une erreur judiciaire.
En 1997, une équipe d’avocats, aidée financièrement par une association
française, reprend le dossier et mène une contre-enquête qui met en pièces
l’accusation. Pour les avocats, l’enquête menée par la police a été bâclée,
voire manipulée : des tâches de sang de la victime auraient été déposées
volontairement sur les vêtements de Barnes et un des témoins-clef, sous le
coup d’une accusation pour vente de drogue, aurait bénéficié d’un sursis en
échange de son témoignage.
La reconnaissance des erreurs judiciaires fait quand même réfléchir certains
hommes politiques américains. Dans l’Etat d’Illinois, le gouverneur a
décrété un moratoire sur la peine de mort, suspendant toute exécution, "tant que l’Illinois n’aura pas la certitude morale que seuls les coupables
sont exécutés". En Illinois précisément, treize personnes ont échappé à la
peine de mort, grâce à des étudiants en journalisme. Le record est détenu
par la Floride, qui a connu au moins 20 erreurs judiciaires. Pour le moment,
au Texas, Georges Bush Jr reste sourd, refusant même de reconnaître les
faiblesses du processus judiciaire. Force est pourtant de constater que la
majorité des condamnés à mort sont noirs et pauvres. Une prise de conscience
est plus que nécessaire. La vie d’hommes et de femmes en dépend. Odell
Barnes n’a peut-être commis d’autres "crimes" que ceux d’être noir, pauvre
et de vivre au Texas.
©Laurence Jamotte, 2000.
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