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CHRONIQUES DE LAURENCE JAMOTTE
24 Décembre 1999-Elian enjeu d'un bras de fer ridicule et dramatique
Nom : Gonzales. Prénom : Elian. Age : 6 ans. Nationalité : cubain. Adresse : indéterminée...
Elian est le rescapé d'un funeste voyage de Cardernas (Cuba) vers Miami. Embarqué sur
un canot de fortune, il a vu se noyer sous ses yeux, sa mère, son beau-père et une dizaine
d'autres candidats à l'immigration. Sauvé parce qu'il s'était accroché à une chambre à air,
Elian à été ensuite secouru le 25 novembre dernier, au large de la Floride, par les gardes côtes
américains et remis à sa grand-tante et son grand-oncle, réfugiés cubains depuis de longues
années à Miami.
Dans son malheur, Elian n'a pas tout perdu. A Miami il est entouré par des proches.
A Cuba son Père et ses quatre grands-parents l'attendent. Mais c'est de là que vient le hic.
Elian est réclamé à la fois par les uns et par les autres. Pire encore Elian est devenu l'enjeu
central d'un énième bras de fer entre les Etats-Unis et Cuba, son sort, une affaire d'état.
De Cuba, le père de l'enfant a affirmé que son ex-femme a emmené Elian sans son consentement
et sous l' "influence" et la "manipulation" de sa famille de Miami. C'est pourquoi il réclame,
avec le soutien des grands-parents, le retour de son fils auprès de lui. De leur côté, les autorités
américaines ont appliqué la législation du "Cuban Reajustmaent act", qui accorde à tout résident
cubain le droit de rester aux Etats-Unis dès qu'ils posent le pied sur le sol américain. Un tribunal
local devrait prochainement statuer sur son sort.
En attendant, le petit garçon, considéré comme le rescapé de la misère et du désespoir cubain,
est devenu l'effigie du million de membres de la communauté cubaine réfugiée en Floride et le
nouveau fer de lance de la lutte anti-castriste. La fondation américano-cubaine à d'ailleurs fait
imprimer des milliers de posters, avec pour message "le dernier martyr de Fidel Castro" et en toile
de fond une photo du petit garçon. . Ensuite, c'est à la télévision américaine qu'Elian est apparu
au milieu de jouets, demandant l'asile pour ne pas retourner à Cuba. Reste à savoir si cette demande
lui a été soufflée ou s'il s'agit réellement de sa volonté.
Quant aux autorités cubaines, elles dénoncent le "show grotesque" et à leur tour bombardent les
écrans cathodiques de témoignages larmoyants du père et des grands-parents, de photos de famille
et des objets personnels du petit garçon, à forte valeur affective, comme une épée de bois "taillée
avec amour" par le grand-père. Fidel Castro n'a pas non plus mâché ses mots en parlant de "flagrant
délit de séquestration" et refusant toute décision émanant d'un juge corrompu de Floride". Le Leader
Maximo a en outre averti qu'il livrerait "une bataille mondiale de l'opinion publique" et a promis de
"gigantesques manifestations". L'une d'elle a déjà rassemblé deux millions de personnes dans les rues
de Cuba.
A L'approche de Noël, le ministre de la Justice américaine, dont dépendent les services de
l'immigration et donc le sort du petit garçon, espère que "l'affaire sera réglée avant la fin de l'année".
Si Elian ne venait pas de Cuba, sans doute aurait-il déjà été mis dans un avion et rendu à son père
comme le préconise le droit international. Mais la loi américaine distingue Cuba des autres pays.
Tant pis pour Elian, pour son bonheur. Il est Cubain.
©Laurence Jamotte, 1999.
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