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CHRONIQUES DE LAURENCE JAMOTTE
10 Décembre 1999-L'Algérie, vers une recrudescence des violences
Avec le début du Ramadan, l'Algérie craint une nouvelle flambée de violence.
Depuis plusieurs semaines, une nette recrudescence des attentats a déjà été
observée. La loi dite de la " concorde civile ", qui permet aux "islamistes"
non impliqués dans des crimes de sang ou des viols, d'être amnistiés, ne
remporte pas le succès attendu. Le nombre de "terroristes" qui se sont
rendus s'élève officiellement à près de 1 300 personnes, ce qui reste
largement insuffisant pour enrayer la violence.
Les critiques envers "l'immobilisme du président" se font dès lors de plus
en plus vives. "Mal élu " en avril dernier, en raison des fraudes alléguées
et du retrait de ses adversaires, le président algérien avait pourtant
acquis une légitimité certaine, grâce au succès du référendum sur la
concorde civile. Ses déclarations avaient également suscité l'enthousiasme
de la population.
Rompant avec le discours officiel des sept années de guerre, Abdelaziz
Bouteflika était apparu rapidement comme un "briseur de tabous", un "tueur
de mythes", un "ensorceleur". Il a parlé sans ambages et a donné
l'impression de vouloir nettoyer les écuries d'Augias. Surtout, il s'est
présenté comme celui qui pouvait ramener la paix en Algérie. Ses promesses
ont séduit la plupart des Algériens et même la communauté internationale.
Bouteflika avait placé la barre très haut. Sans doute trop haut.
Près de huit mois plus tard, les Algériens voient leurs espoirs déçus. Seuls
quelques changements sont intervenus. Des walis "pourris" ont été limogés et
pour l'heure, Bouteflika semble s'attaquer aux magistrats corrompus. Au delà
de ces gestes fort médiatisés, Bouteflika semble en fait ne pas pouvoir se
défaire de l'emprise des clans politico-militaires qui gravitent autour du
"pouvoir". En témoignent les difficultés du président à constituer un
nouveau gouvernement et son constant besoin de rappeler qu'il est le chef
des forces armées.
Mais le bras de fer que Bouteflika a engagé avec les "vrais décideurs", via
les communiqués de presse et autres déclarations, ne répond pas aux attentes
des citoyens. Les Algériens n'ont que faire d'un énième combat des chefs.
C'est à la paix qu'ils ont dit "oui" lors du référendum sur la démarche
présidentielle, pas à de vaines paroles lancées pour s'attirer la sympathie
du peuple, de la communauté internationale et des investisseurs étrangers.
Pour ramener la paix, il ne suffit pas de promettre la liberté aux " égarés
". Il est temps de se mettre autour d'une table et de lever le voile sur le
sort des personnes disparues, des exilés, des prisonniers politiques, sans
oublier les familles des victimes, les personnes mutiléesà vie, physiquement
et psychologiquement. Le traumatisme de la société algérienne est profond.
La réconciliation suppose de faire la lumière sur ces passages noirs de
l'histoire et non de tourner la page.
©Laurence Jamotte, 1999.
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